Bienvenue en Eurasie
A Białistok, j’emprunte la route de Minsk pour atteindre le poste frontière allant vers Vaŭkavysk. Il est déjà près de 15 heures. Le soleil est si bas sur l’horizon que le jour tend à se réduire de minutes en minutes. Je ralentis à la vue des bâtiments de la douane. Pas de formalités du côté polonais. Derrière la vitre, je montre mon passeport européen. Sans vérifier, le douanier me salue et me fait signe d’aller. J’avance lentement vers la douane biélorusse. Lest tenues sont plus décoratives pour en imposer davantage et les allures plus rigides. Les casquettes se veulent plus autoritaires et les bottes sont de rigueur… mais elles sont dans un caoutchouc bien terne. Le poste de contrôle a un petit air kitsch très soviétisant.
Rapide retour arrière sur un passé pas encore digéré. Mais on n’est pas là pour s’amuser. Un douanier s’approche ; je baisse la vitre. Il tend la main, sans rien dire. A mon tour, je présente mon passeport, mon visa dûment tamponné, mon permis de conduire international, mon certificat d’immatriculation du véhicule, ma déclaration de devises étrangères (vive l’Euro), ma réservation d’hôtel bien datée qui me sert de certificat de destination, le livret de déclaration du matériel en importation temporaire. Le tout en anglais et biélorusse. Il prend les documents, semble les parcourir un à un. Il se penche à nouveau et me montre l’arrière du véhicule : il veut visiter. Je sors, ouvre les portes puis le coffre. Visiblement, c’est le dessous des sièges qui semble l’intéresser. Il se penche plusieurs fois… puis abandonne. Bide sur un vide ! Pas de produits de contrebande à confisquer donc pas de petit bonus personnel ou de possibilités de tractations lucratives. Chou blanc ! Il reste impavide bien que je le sens déçu ! Mais une chose vient à l’inquiéter : la raison du voyage. Il me la demande sur un imprimé, mi-biélorusse, mi-anglais. Je montre la ligne « tourisme » bien sûr ! Hrodna (Grodno en polonais) reste la plus belle ville baroque du pays. La perle de la Russie noire ! Ville séculairement tantôt polonaise, tantôt lituanienne, elle semble avoir toujours pris ses distances avec la Russie : c’est le fief catholique du Belarus et la messe y est toujours célébrée… en polonais ! Ma réponse semble lui convenir. Avec mes papiers, il rentre dans le poste de contrôle et j’entends les coups de cachet crépiter. Il doit en mettre partout. Il renchérit avec un gros tampon articulé : çà doit être le dateur. Sans laisser l’encre sécher, il referme le tout, sort et me rend tous mes certificats. Je me montre aussi méfiant que lui et je vérifie que tout y est, tamponnages compris. Ici, une lacune ou une erreur administrative est l’annonce d’un séjour forcé compliqué et une rétention administrative est toujours à craindre. Je prends trop de temps. Il s’impatiente et me fait signe de partir. Son collègue vient de lever la barrière. Il est temps d’y aller… avant qu’il ne change d’avis ! Je salue de la main et c’est parti. Non pas tout à fait. Il y a un obstacle devant le capot.