Humour Anglais

L’humour anglais demeure souvent pour les Continentaux un profond puits d’interrogations, parfois teinté d’admiration, devant une forme sophistiquée où la noirceur du propos se mêle à l’absurde. Souvenez-vous des films de Charlot (Charlie Chaplin était avant tout un Anglais) si Rowan Atkinson – alias Mr Bean –  ou Benny Hill vous laissent de marbre.

Ce mélange des genres est un motif de plus pour que nos voisins anglais si proches restent pourtant si lointains. Georges Duhamel écrivait que
l’humour anglais est la “politesse du désespoir”.
Ce serait  Ben Jonson, écrivain contemporain de Shakespeare, qui aurait fait la première association de l’humour avec le comique dans “Every man out of his humour” et qui le débarrassa de son origine tragique héritée du Moyen Age.
Parfois proches de la folie, ses personnages sont en décalage perpétuel avec leur propre tempérament (humour). Ils ont une double nature. Et cette dualité, maintes fois reprise, marque à jamais la littérature et l’histoire anglaises, miroir de son peuplement qui nous parait ainsi si différent.

Exemple de folie dans le binôme “Anglais – Bière” :

Smith entre dans un pub et prend deux verres :
– Le premier c’est pour moi et, comme mon copain est mort, j’ai juré d’en prendre toujours un autre pour lui.
Et c’est ainsi tous les jours. Mais il revient un soir et ne prend qu’un seul verre.
– Alors, et votre serment ? dit le waiter.
– Golly ! (doux Jésus) Il tient toujours ! C’est moi qui ai décidé d’arrêter de boire

Pour faire docte, l’humour, c’est la conscience souriante de notre propre excentricité. Un réflexe typiquement anglais qui constitue un des ciments de la vie sociale anglaise. Il est le produit de l’éducation et a donc longtemps été élitiste.

Car tout gentleman est naturellement doué d’humour !

Cet humour, souvent ravageur, s’applique à une situation vécue mais sitôt détournée pour devenir impossible ou incroyable. Et même les grands hommes y succombent.

Exemple véridique d’à propos dissimulant la colère :
Lady Astor à Winston Churchill :
– “Monsieur, si vous étiez mon mari, je verserais du poison dans votre verre.”
Winston Churchill à Lady Astor :
– “Madame, si vous étiez ma femme, je le boirais.”

Exemple aussi véridique opposant avantage et inconvénient :
Une indisposition du général de Marlborough (famille illustre depuis des siècles dont un des avatars fut Winston Churchill) l’avait obligé de recourir à un médecin, qui fit son métier : il prescrivit une médecine. Elle n’avait pas l’air savoureuse ; le patient esquissa une grimace.
La duchesse, sa femme, pour l’encourager, s’exclama :
— “Que je sois pendue si cela ne vous fait pas du bien !”
— “Allons, mylord, prononça tranquillement le docteur Carlh, avalez ! D’une façon ou de l’autre, vous y gagnerez !”

Mais l’humour est différent de l’esprit (encore réservé à l’élite) qui lui exige de la culture pour afficher ses oppositions de registres (souvent fait de conformisme, voire de méchanceté).

L’humour est plutôt modeste et pratique l’autodérision. Bref, il est humain. L’Anglais étant différent du Français, ce dernier reste en peine pour le comprendre et sans doute jamais l’apprécier.

Exemples d’esprit :
Lord Balfour aurait dit :“Un Français est arrogant, et il le sait. Un Anglais est arrogant, mais il ne le sait pas !”


Charlie Chaplin et Einstein conversaient ensemble :
– “Ce que j’admire chez vous, c’est que votre art est international”, déclarait Einstein à l’artiste. “Tout le monde vous comprend”.
– “Mais”, répond Charlot, “votre gloire est encore plus méritoire : tout le monde vous admire et pourtant personne ne vous comprend !”


⬤Apercevant un jour dans une rue de Londres la silhouette de Pope, le grand poète satyrique du XVIIIème siècle, le plus subtil de son époque, le roi George II dit à ses compagnons : “Je voudrais bien savoir à quoi nous sert ce petit homme qui marche de travers ?”.
Il faut rappeler qu’Alexander Pope était atteint depuis son enfance du mal de Pott, une infection des disques intervertébraux due à la tuberculose et il en avait gardé une petite taille. Catholique clandestin (recusant), il était socialement isolé, d’où la flèche du roi.
On rapporta la chose au poète qui répliqua immédiatement :
“À vous faire marcher droit”.

Exemple d’humour :
Deux semaines avant sa mort, George V, fervent collectionneur de timbres, feuilletait un de ses albums ; il contenait la série de l’Empire britannique. Il la contempla longuement et, en présence de son valet de chambre Richard Howlett, prononça soudain à haute voix « Voilà une série dont l’effigie va être bientôt renouvelée ».

Du XVIème au XVIIIème siècle, l’humour tend de plus en plus vers le comique pour devenir presque du pince-sans-rire. Mais au XIXème siècle, l’humour est renouvelé par la logique extrême jusqu’à l’illogisme et le non-sens dont Lewis Caroll reste le maître. Le nonsense, c’est l’art de développer des raisonnements dénués de sens sous une apparence logique.

Exemple de logique paradoxale :
Un type rentre dans un pub et commande 8 whiskies “line them up” (ras bord).
Il les boit, puis commande de nouveau 7 verres qu’il boit aussi.
Après petite réflexion il en recommande 6, puis 5 et pendant qu’il les vide vient un ami.
– Alors notre homme lui dit : “Il m’arrive un truc bizarre, moins je bois plus je suis saoul”!

Autre exemple de logique paradoxale :
Trois scientifiques, un ingénieur, un biologiste et un mathématicien discutent derrière la vitre embrumée d’un pub dans Charing Cross Road. Ils voient que 2 personnes entrent dans une cabine téléphonique située en face du pub. ¼ d’heure plus tard, 3 personnes en sortent.
– L’ingénieur dit : “Les données initiales étaient fausses”.
– Le biologiste dit : “C’est simple, ils se sont reproduits”.
– Le mathématicien dit : “Si 1 personne entre de nouveau dans la cabine téléphonique, elle redeviendra vide“.

Autrement dit, l’Anglais a la conscience de l’irrationalité du langage. Ce n’est pas le penchant français pour le jeu de mots car l’Anglais joue, lui, avec le “double-sens”. Ajouté aux allusions culturelles, quand ce n’est pas aux jeux des accents régionaux, le trait devient difficile à comprendre. Reste que tout Continental peut demeurer ébahi devant la délectation toute britannique d’une répartie qui ne demeurera à jamais qu’une suite de mots. Qui n’est pas resté coi devant des “wits”, traits d’esprit cinglants, quand ce n’est pas devant des expressions intraduisibles, les “puns” (calambours).

Exemple :
Deux fermiers chargent des vaches dans une bétaillère. L’un dit à l’autre “Put the cattle on !”. Et tous deux de s’esclaffer. Le Continental n’a pas vu que phonétiquement ce “monte le bétail”, cela donnait aussi “Put the kettle on !” (mets de l’eau à chauffer) du rituel préparatoire au tea time.

L’humour anglais, ce sont les “jokes” (blagues), surtout des comiques de situation, où se disputent l’inattendu et l’absurde, quand ce ne sont pas les deux ensemble, parfois à contre-pied. Chaque région a ses sujets favoris.

L’effet peut être dévastateur quand s’y ajoute une expression de flegme ou de détachement faussement contenu. La façon de dire compte alors au moins autant que le dit.

Exemple de l’inattendu :
Un chasseur de têtes demande à un candidat pour un poste de trader à la City :
– Voici un dessin qui représente une mer. Trois hommes nagent. Un requin s’approche d’eux et les menace. L’un des nageurs évolue en toute confiance, totalement désarmé. Le deuxième tient un grand couteau et est prêt à défendre chèrement sa peau. Le troisième a pris la précaution d’emporter un fusil lance- harpons.
A quel personnage de ce dessin vous identifiez-vous ?
– Arrrr ! … Au troisième homme, répond le postulant.
– Dommage ! Ce que nous cherchons, ce sont des requins.

Mais le recours à l’inattendu ne présuppose pas que la logique soit finalement perdante. Une sorte de moralité, ou d’immoralité logique, dans la chute devient d’autant plus crédible qu’elle renvoie à la (triste) réalité. Le côté ravageur est assuré quand l’énoncé devient plausible.

Exemple de cas de conscience et de finesse pragmatique :
L’exposé n’est peut-être pas véridique et pour un Français, il constituerait plutôt une aimable devinette de jeu de salon.
Une compagnie cherche à recruter un cadre. Une des questions posée au cours de l’entretien est :
“Vous êtes en train de conduire votre voiture pendant une nuit de violent orage. Vous passez à côté d’une station de bus dans laquelle des gens attendent :
– Une vieille dame qui semble être sur le point de mourir.
– Un docteur qui vous a déjà sauvé la vie une fois.
– Un homme / Une femme de vos rêves.
Sachant que votre voiture ne peut prendre qu’une personne, dites ce que vous faites et expliquez votre réponse.
La bonne réponse est :
“Je donne les clefs de ma voiture au docteur, le laisse prendre la vieille dame pour l’emmener à l’hôpital, et ainsi je me retrouve seul avec la personne de mes rêves à attendre le bus avec l’avantage non négligeable de passer pour un héros à ses yeux.”

Dans l’humour anglais, on trouve peu de raillerie, rarement du potache et presque jamais du “bon-vivant”, tous très prisés en France. En Angleterre, on fait dans la discrétion dialectique et le calme cérébral. Mais n’oubliez pas : en Angleterre on ne s’esclaffe pas (ou très peu) à moins d’être Gallois (facilement taxé d’amabilité béate), Ecossais (réputé comme expansif) ou pire Irlandais (accusé de comportement explosif). Ici, on rit de l’intérieur. Tout est dans l’assimilation de la mesure entre introversion et extraversion (understatement versus overstatement).


Définitions.

L’understatement consiste à se décaler par rapport à la réalité, à toujours minimiser les faits, à contenir ses émotions et ses réactions à tout relativiser et surtout à ne rien laisser paraître. L’effet est dans la seule chute.

Exemple sur le couple conjugal :
Deux Anglais sont sur un green en train de taper la balle de golf. Soudain, un convoi funèbre passe. L’un des deux joueurs enlève son chapeau et attend le passage, en faisant mine de se recueillir.
– “Ca alors”, lui fait l’autre, “j’ignorais qu’un homme comme vous était aussi “gentleman” !
– “Que voulez-vous, nous avons quand même été mariés 40 ans”.

Exemple sur la chaîne des malheurs :
Au beau milieu de l’Atlantique Nord, un chalutier vient de faire naufrage.
Dérivant à bord de leur canot de sauvetage, les marins commencent à souffrir de froid, de faim et de soif lorsqu’un gigantesque paquebot les repère enfin.
Le commandant du paquebot dit à son équipage :
– “Faites vite, montez ces naufragés à bord et donnez leur à boire, à manger et de quoi se réchauffer”.
Quand les pêcheurs sont à bord du paquebot, le commandant les accueille :
– “Vous avez de la chance que notre bateau passait par-là. Au nom de tout l’équipage, je vous souhaite la bienvenue à bord du Titanic”.

Cela ne signifie pas que les Anglais sont incapables de sentiment : ils appartiennent quand même à l’humanité ! Bien que cela ne soit pas certain pour tout le monde. Mais pour vous en convaincre, allez au stade ou à l’hippodrome : voyez et écoutez.

L’humour anglais use et abuse de ces situations graves décalées vers le non-dit, mais cela ne serait pas tout à fait aussi drôle si, à l’occasion, on ne se permettait pas le contraire, c’est-à-dire un décalage dans l’autre sens, en exagérant fortement un tout petit fait banal. C’est “l’overstatement”.

Exemple sur le poids des traditions difficiles à faire évoluer :
Pour plaire à la Reine qui est lasse de s’adapter à la conduite du mauvais côté quand elle est sur ces terres de France (mais qu’elle préfère pour sa pluie plus légère), le gouvernement pour lui plaire a décidé qu’à partir de son prochain anniversaire officiel, sur tout le territoire, les automobiles devront rouler à droite, et non plus à gauche. Si l’expérience est concluante, à partir de l’année suivante la mesure sera adoptée aussi pour les camions… et l’année d’après pour les autobus.

Exemple sur l’organisation du monde :
Trois amis, un chirurgien, un architecte et un politicien discutent au pub devant une pinte pour savoir quelle est la plus ancienne de leurs professions :
– “C’est la mienne”, assure le chirurgien. “La Bible dit bien qu’Eve est née après qu’Adam eut subi l’ablation d’une côte”.
– “Non, c’est la mienne”, fait l’architecte. “Le monde a été crée à partir du chaos. C’est là bien évidemment un travail d’architecte !”
– “Et alors”, questionne le politicien, “à votre avis, qui avait créé le chaos ?”

L’humour anglais, c’est aussi de l’autodérision, de la moquerie des conventions et des institutions montées en épingle par un trait bien piquant.

Rien ne semble y échapper. Les stéréotypes, les coutumes, les travers usuels quand ce ne sont pas les tares attribuées aux autres… ou à soi-même, sont  prétextes à plaisanteries

Exemple avec les affaires de l’argent (“Business is business, as usual”) :
Un vieil avare va mourir seul, sans famille et sans ami. Peu avant sa mort (par précaution, mieux vaut diviser pour avoir la certitude de ses dernières volontés), il reçoit son avocat, son médecin et son pasteur pour leur confier à chacun 50.000 £ en espèces avec pour mission d’enterrer cet argent avec lui le jour de ses funérailles. Peu après, il meurt.
L’enterrement a lieu quelques jours plus tard. Après les funérailles, le pasteur, le docteur et l’avocat discutent sous le préau du presbytère :
Le pasteur confie que son église ayant un besoin urgent d’un nouveau clocher, il a gardé 20.000 £ pour sa réfection.
Le médecin, faisant des recherches sur le cancer, confesse que lui aussi a gardé de l’argent, soit 30.000 £ pour continuer ses recherches.
L’avocat les blâme sévèrement : “Comment pouvez-vous être si malhonnêtes ? Moi j’ai placé dans le cercueil un chèque du montant total de ce qu’il m’avait confié”.

Les petites manies font aussi les choux gras des plaisanteries “à l’emporte pièce”, surtout si elles donnent lieu à des traits d’à propos que le ton faussement détaché saura magnifier.

Exemple avec la manie des “auctions” (ventes aux enchères qu’on trouve régulièrement même dans les plus petits villages) :
Au cours d’une vente aux enchères, le commissaire-priseur annonce :
– “Le prince Abdullah Ben Saoud ici présent à notre charité a perdu son portefeuille. A la personne de l’assistance qui le lui rapportera, avec tout ce qu’il contient, il offre une récompense de 5.000 £.”
Aussitôt, de divers points de la salle, des regards tournent en tous sens et des mains portant numéros et des voix s’élèvent :
– “6.000…”
– “7.000…”
– “8.000…”

Mais l’humour recourt aussi à la répartie cinglante, notre “tac-au-tac”, surtout si la situation semble désespérée, histoire de finir avec panache. C’est le secteur favori des bons mots historiques à destination des générations futures.

Le côté bravache avec une touche d’élégance fondée sur une vérité factuelle est typique de la gentry britannique (en français, les gens bien) en faisant l’admiration des Continentaux. Genre disparu en France avec l’ancien régime au XVIIIème siècle.

Exemple véridique du XVIIème siècle en cour de justice :
Le fameux juge Jeffreys a été Lord Chief Justice avant d’être Lord Chancellor. C’était un homme si cruel qu’on lui attribue 700 condamnations à mort lors des sinistres “Bloody Assizes” contre les insurgés de la “Monmouth’s Rebellion” de 1685 (même si elles ne se monteraient qu’à 160 à 170 opposants à la nomination de Jacques II).
Il montra un jour avec sa canne un voleur assis au banc des accusés.
— “Il y a une grande canaille à l’extrémité de ma canne”, dit-il.
L’accusé, qui n’avait rien à perdre, éleva la voix :
— “Et à quel bout, mylord ?”

L’humour n’exclut pas d’envoyer quelques piques entre voisins, tout proches mais tellement différents. Aussi bien ceux de la maison d’en face que ceux des autres contrées que sont le pays de Galles, l’Ecosse et l’Irlande, tous victimes de défauts, voire de tares, dont seule l’Angleterre semble dépourvue par la grâce de Dieu et de la Reine.

Exemple de chauvinisme Irlandais à l’encontre du tout puissant Anglais :
Un Anglais et un Irlandais sont au Moyen-Orient. Arrêtés pour un délit, ils sont condamnés à recevoir 10 coups de fouet avant d’être expulsés. Toutefois, le responsable de la prison leur permet d’exprimer un vœu sur les conditions d’application de la sanction.
L’Anglais passe le premier, bien sûr, et demande qu’on lui attache un coussin sur le dos.
C’est chose faite, mais au bout de cinq coups, le coussin est déchiré et les cinq derniers sont très douloureux.
L’Irlandais, par contre, commence par demander que l’on double le nombre de coups de fouet, et … qu’on lui attache l’Anglais sur le dos

Mais finalement l’Anglais ne serait pas membre de l’humanité sans s’intéresser à la vie très privée, celle d’au-dessous de la ceinture. Mais contrairement à la grivoiserie qu’un Latin attendrait, l’humour peut être mis en œuvre par un message littéraire subliminal.

Exemple inversé maintenant sur la trilogie “Anglais – Ecossais – Irlandais” :
Un Ecossais, un Anglais et un Irlandais se trouvant dans un pub pour oublier leurs déconvenues conjugales, se penchent chacun sur leur verre puis s’épanchent mutuellement et, quelques pintes aidant, commencent les confidences :
L’Ecossais raconte: “Je suis sûr que ma femme me trompe avec un bûcheron. Sous le lit, j’ai retrouvé une hache et une scie.”
– “Et moi”
, dit l’Anglais, “je sais qu’elle me trompe avec le forgeron, j’ai retrouvé un marteau et des pinces sous mon lit !”
“For Pete’s sake ! Old chaps !” (Nom d’une pipe, les gars) s’exclame l’Irlandais. “Grâce à vous, enfin je vois clair ! Ma femme me trompe avec un cheval !”
– Blast it ! (fichtre) un cheval ?
– “Oui, un cheval ! Sous le lit, j’ai retrouvé un jockey !”

Mais finalement l’Anglais ne serait pas membre de l’humanité sans s’intéresser à la vie très privée, celle d’au-dessous de la ceinture. Mais contrairement à la grivoiserie qu’un Latin attendrait, l’humour peut être mis en œuvre par un message littéraire subliminal.

Exemple (pas trop scabreux) sur le sexe :
Betty, 9 ans, demande à sa maman :
– “Mumm, quel âge as-tu ?”
– “Cela ne se demande pas ma chérie”
, lui répond sa mère.
– “Mumm, combien tu mesures ?”
– “Cela n’est pas important ma chéri”
, reprend la mère.
– “Mumm, pourquoi toi et papa avez divorcé ?” redemande la petite fille.
–  “Cela ne te regarde pas ma chérie”, dit la mère en terminant la discussion.
Betty, qui veut tout savoir, ne sait comment contourner ce silence. Pendant le cours de culture anglicane chez le pasteur, elle demande à voix basse et à plusieurs reprises à sa meilleure copine qui tarde à répondre, pourquoi les adultes ne parlent pas de ces choses-là.
Sa copine finit par lui dire :
– Keep quiet, please. Je vais te dire. C’est vraiment simple. Toutes les réponses à nos questions sont sur leur carte d’identité (qui n’est toujours pas obligatoire chez nos voisins Grands Bretons).
Le lendemain la petite fille fouille dans le sac à mains de sa mère et trouve sa carte d’identité. Elle est ravie de voir que son amie disait vrai, toutes les réponses à ses questions s’y trouvent !
Elle court alors voir sa mère et lui dit :
– “Mumm, je sais ton âge.”
– “Ah oui ? Et j’ai quel âge ?”
– “36 ans. Et je sais combien tu mesures.”
– “Ah oui ? Combien ?”
– “5 feet 7 inches”(~1,72 m). Et je sais aussi pourquoi toi et papa avez divorcé.”
– “How about that !”
(tiens donc) “Et bien cela m’étonnerait fort !”
– “So help me !”
(je te jure) “Tu as eu un “F” en sexe (car ici on note avec des lettres à partir de A+ “très excellent” et pas avec des chiffres)… c’est vraiment pas une bonne note ! Tu aurais pu vraiment faire un effort ! Tu sais bien que Papa veut du travail bien fait et en veux toujours plus. Tu aurais pu t’appliquer, même si tu devais comme moi tirer la langue en le faisant !”

Elevons le propos. Même la religion y a droit, mais avec tact en y ajoutant une spécificité toute britannique qui adoucit le propos.

Exemple papiste :
A l’invitation du l’archevêque de Canterbury mû par un acte d’œcuménisme, le Pape François se rend à Buckingham Palace pour y rencontrer la Reine, Chef de l’église anglicane. Comme François est très “peuple” et un peu facétieux, il lui vient une idée.
– “Chauffeur, Est-ce que je pourrai conduire un moment, s’il vous plaît ?. J’aimerai tant essayer la conduite du côté du diable” (on the left, indeed).
– “Sure”
, dit le chauffeur. “Comment pourrais-je refuser à votre Sainteté”.
François prend le volant et le chauffeur se place à l’arrière. Le Pape commence à rouler à contre sens, coupant la route aux voitures mais esquivant les piétons (car le berger doit sauver son troupeau)….
Un Bobby finit par l’arrêter. Mais quand le Pape baisse la vitre, il le reconnaît et, stupéfait, inspecte l’intérieur de la voiture…
Ne sachant pas quoi faire devant une situation aussi embarrassante, il appelle son supérieur :
– “Chef, je crois que je viens d’arrêter quelqu’un de très important et je ne sais pas quoi faire !”
– “Important comment ?”
demande le chef. “Est-ce le Lord Maire ?”
– “Non pas.”
– “Le Chancelier de l’Echiquier ?”
– “Non beaucoup plus.”
– “Quoi, vous avez arrêté le Premier Ministre ?”
– “Non chef, je crois que c’est beaucoup plus.”
– “Vous n’allez pas me dire que vous avez arrêté le Pape”
, rigole le chef.
– “Non chef, c’est sans doute plus. Le pape, c’est son chauffeur !”

Exemple : Moïse, Jésus et un vieux barbu jouent au golf à St Andrew :
Moïse prend son club, et, d’un coup élégant, envoie sa balle. Elle monte en l’air avec un superbe mouvement et tombe en plein milieu de la baie (Old Course, le prestigieux mais démodé parcours est en bord de mer) ! Moïse ne se trouble pas. Il lève son bois (un n°1 sans doute) et les eaux s’ouvrent, lui laissant le passage pour jouer un nouveau coup.
C’est maintenant au tour de Jésus. Il prend son club (vraisemblablement un fer n°1) et d’une parabole (sic !) parfaite, il envoie également sa balle dans la mer, où elle tombe sur un amas d’algues. Sans s’énerver, Jésus marche sur l’eau jusqu’à la balle, et frappe à nouveau vers le green (pas par un pitch mais un spin, because, the crown of thorns).
Ensuite, le vieux barbu prend son club et, d’un geste très approximatif, envoie sa balle. Elle ricoche sur un arbre, rebondit sur un caillou puis à nouveau sur un arbre. De là, elle tombe sur le toit du club-house, roule dans la gouttière puis dans le canal qui la conduit dans la baie. Là, un gros saumon qui se trouve à côté l’avale. Alors un épervier fonce sur le poisson et l’attrape entre ses serres. Il prend son vol au-dessus du terrain de golf, mais le saumon, pris de vertige, laisse tomber la balle qui tombe juste dans le trou !
Moïse se tourne alors vers Jésus et dit :
 – J’en ai marre de jouer au golf avec ton père !

Contrairement au catholicisme très encadré par les dogmes mis en place dans un dessein de conquêtes, l’anglicanisme est une construction de réaction (en fait une sordide affaire du divorce d’Henri VIII mal géré). Il en ressort un rapport différent avec la religion et les Ecritures qui permet une approche personnelle des textes et de leur contenu. Ainsi un dernier exemple pour finir sur le même registre où la Bible se mêle à l’âme ancestrale du commerçant rompu aux usages de la Banque. En V.O.

The lost chapter of Genesis :
Adam was hanging around the garden of Eden feeling very lonely. So, God asked him :
– “What’s wrong with you ?” Adam said he didn’t have anyone to talk to.
God said that He was going to make Adam a companion and that it would be a woman. He said :
– “This pretty lady will gather food for you, she will cook for you, and when you discover clothing, she will wash it for you. She will always agree with every decision you make and she will not nag you and will always be the first to admit she was wrong when you’ve had a disagreement. She will praise you ! She will bear your children and never ask you to get up in the middle of the night to take care of them. “She will NEVER have a headache and will freely give you love and passion whenever you need it.”
Adam asked God : “What will a woman like this cost ?”
God replied : “An arm and a leg.”
Then Adam asked : “Fair enough ! What can I get for a rib ?”
Of course, the rest is history…:

Arrivé au terme de cette brève exploration de l’humour britannique, on ne peut que constater que ce qui pousse à sourire, car vous avez retenu que l’on ne rit pas sauf à afficher une roture séculaire, relève d’une construction cérébrale particulière qui a pour objet de sensibiliser des zones différentes du cerveau britannique par rapport à un cerveau  continental.

Pour le démontrer, des chercheurs anglais (Cf. Nature Neuroscience, March 2001 Volume 4 Nr 3 pp 237–238) ont bombardé 14 volontaires de blagues anglaises de deux types : phonétiques ou sémantiques.

Les premières qui sont des calembours ou des jeux de mots (typiques des blagues continentales) activent une région du cerveau impliquée dans le traitement des sons, le cortex préfrontal gauche. Pour les secondes qui jouent plus sur le sens des mots (particulières aux jokes britanniques), c’est le lobe postérieur gauche qui est activé. Remarquez au passage, comme pour la circulation automobile, que dans les plaisanteries le cerveau fonctionne à gauche. Mais quel que soit le type de plaisanterie, une même zone du cerveau s’active si la blague fait mouche : le cortex préfrontal médian. Cette région représente la composante affective de l’humour ; elle a déjà été mise en évidence comme étant associée à une récompense et à l’affect.

Quand on vous disait que l’humour anglais était cérébralement “spécifique” et que certains de ses aspects tenaient de la folie ! Et avec la folie, on boucle sur notre introduction. L’humour anglais, et derrière, la vie anglaise, contient de la folie et vous devez en être convaincu. Une dernière preuve ? Un aveu royal, impérial ? La reine Victoria écrivait à la fin de son règne :

“A mesure que je deviens plus vieille — elle régna pendant 63 ans 7 mois et 2 jours, — je pense de moins en moins comprendre le monde, je ne pense pas comprendre ses petitesses quand je vois toute cette frivolité, il me semble que nous sommes tous un peu fous”.

Et pour vraiment finir comme dans un tabloïd, la Gazette ne pouvait passer à côté de la prime au lecteur. Elle est, en respect des standards, représentative des valeurs de l’Empire, destinée à valoriser son bénéficiaire, choisie pour lui faire prendre conscience de son appartenance à une catégorie particulière de l’humanité et, last but not least, à véhiculer (it’s the right word, indeed !) le bon goût séculaire britannique (and delicately vintage !).

Quoi donc de plus prestigieux qu’une magnifique

JAGUAR MKII SALOON 1959

couleur Bordeaux de Blenheim (Regards, Mr Churchill) que tout lecteur assidu pourra demander gratuitement en déposant sa demande à l’adresse franco-britannique :

padraig_o_naomh.hotmail.fr

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